Bien le bonjour chers abonnés, voici votre récap des récents développements sélectionnés par Rimshot Insights :
28, 29 et 30 juillet : Venezuela - Avant la tempête, un contexte à garder en tête
Sommaire :
Contexte, ce qu’on envisageait, avant les élections
Enjeux énergétiques toujours dans les tiroirs
Caractéristiques de ces élections
L’environnement, proche et éloigné
LACA, zone d’influence de la Russie et de la Chine
Point sur le Brésil
Contexte, ce qu’on envisageait, avant les élections
”Bien qu'il ait conclu un accord avec l'opposition pour créer les conditions d'une élection compétitive, connu sous le nom de « Accord de la Barbade », beaucoup doutent qu'il permette une véritable élection libre et équitable, d'autant plus que les sondages ne lui accordent quasiment aucune chance de victoire. Dans ce contexte, un scrutin manifestement truqué pourrait entraîner de nombreuses manifestations, pacifiques et violentes, ainsi qu'une nouvelle isolation internationale, compromettant les récentes ouvertures diplomatiques dans la région” (voir: iai.it).
Et donc…
Le président ré-élu aurait obtenu 51,2 voire 51,6 % des votes. Maria Corina Machado, leader de l’opposition, soutien que le candidat Edmundo Gonzalez Urrutia (voir profil : defesanet.com.br) aurait remporté 73% des votes, les autorités électorales affichant un score de 44%. Maduro et l’opposition annoncent tous deux donc la victoire.
Les résultats sont contestés à l’intérieure et à l’extérieure du pays, faute d’observateur internationaux. Plusieurs documents, affichant largement des scores en défaveur de N. Maduro, ont circulé sur les réseaux sociaux. Néanmoins, certains de ces documents ne sont pas sourcé et nécessiteraient une analyse tout aussi rigoureuse que le décompte officiel et transparent des votes.
Enjeux énergétiques toujours dans les tiroirs
Le Venezuela détient les plus grandes réserves de pétrole (mais non prouvées !!!) au monde. Néanmoins, la production a chuté drastiquement de 3,5 millions de barils/jour en 2008 à moins de 400 000 en 2020, avant de remonter à environ un million de barils/jour récemment. Les infrastructures d’extraction et de raffinement sont vieillissantes, les sanctions américaines ayant aggravé la situation. Ces sanctions allégées, elles devaient permettre une augmentation de la production (de 65 000 b/j) réalisée par Chevron et un nouveau plan de forage. C’était du moins l’objectif, au delà d’une période de 6 mois, si des élections libres étaient organisées. Ceci ne déboucha pas sur un développement favorable, au vu de la mise à l’écart de Maria Corina Machado.
L’autre source des tensions dans le secteur énergétique et diplomatique fut la résurgence du contentieux territorial portant sur l’Essequibo ou Guyana Esequiba, et sur sa manne pétrolière en offshore profond.
Connaissances des énergies a communiqué les chiffres suivants : Les revenus pétroliers du Guyana ont dépassé le milliard de dollars en 2022, et devraient atteindre 7,5 milliards d'ici 2030 selon Jérôme Sabathier de l’IFP Energies Nouvelles. Les estimations de Rystad prévoient que ces revenus cumulés pourraient s'élever à 157 milliards de dollars d'ici 2040. Grâce à ces revenus pétroliers, le PIB réel du Guyana, autrefois parmi les pays les plus pauvres du monde, a connu une croissance de 38,4% en 2023 selon le FMI. Le FMI prévoit également une croissance annuelle moyenne de 20% entre 2024 et 2028 (voir : connaissancedesenergies.org).
Caractéristiques de ces élections
Antérieurement, les élections ont déjà fait l’objet d’une crise politique (2019 - 2022) sur l’illégitimité de la ré-élection du Nicolas Maduro face à Juan Guaidó (élections de 2018). En 2024, la question du vote a l’étranger a particulièrement pesé sur les enjeux des élections. La crise économique et inflationniste, ainsi que la montée des violences, ont en effet conduit à de nombreux mouvements de populations, faisant chuter le nombre d’habitants sur le territoire. On compte 7 774 494 vénézuéliens vivant à l’étranger. Seulement 0,89% d’entre-eux furent autorisés à voter. Par exemple, les frontières avec le Brésil et la Colombie furent fermées dès le 26 juillet.
Par ailleurs, les migrants économiques souhaiteraient un retour au pays dans le cas où l’opposition l’aurait emporté. A contrario, on pourrait s’interroger sur les possibilité de voir plus de mouvement de population, vers le Brésil et la Colombie, ou de retour vers le Venezuela, suite aux élections, aux manifestations et à l’insurrection qui a actuellement lieu.
Selon crisis24, à San Cristobal (État de Táchira) durant l’après-midi du 28 juillet, des assaillants ont attaqué un bureau de vote, faisant au moins des une première victime. L’entreprise de sécurité estime que “Gatherins, demonstrations and clashes are likely across Venezuela through late July following the July 28 presidential election” (crisis24). A Barcelone, dans l'État d'Anzoáteg, la Garde Nationale et de la Police ont remis symboliquement leurs armes et leurs boucliers aux manifestant, et les ont rejoint.
L’environnement, proche et éloigné
Le 30 juillet (05:51 am UTC), une note de Crisis24 énonce que “Le ministre des Affaires étrangères en poste, Yvan Gil, a ordonné à tout le personnel diplomatique d'Argentine, du Chili, du Costa Rica, du Pérou, du Panama, de la République dominicaine et de l'Uruguay de quitter le Venezuela immédiatement ; l'expulsion est une réponse au refus de ces gouvernements d'accepter les résultats de l'élection sans une comptabilisation détaillée” (crisis24.garda.com). Ci-dessous, la communication du Ministère des Relations Extérieures, diffusée le 29 juillet à 10h11 par Yván Gil, Ministre des Relations Extérieures, via son compte X.
LACA, zone d’influence de la Russie et de la Chine
Déjà en 2008, les forces russes et vénézuéliennes ont effectué des manoeuvres conjointes. A l’époque, il s’agit pour la Russie de se réaffirmer dans la région, suite à effondrement de l’URSS. Pour le Venezuela d’Hugo Chavez, il importe alors de répondre à la réactivation de la 4ème flotte des Etats-Unis (inrenees.net). Récemment, la Russie était donc en exercice naval dans la région, suite au sommet de l’OTAN à Washington (12 juin) :
“On June 12, the Russian guided missile frigate Admiral Gorshkov and the Yasen-class nuclear-powered submarine Kazan made a momentous arrival in Cuba’s capital, Havana. Accompanied by the tanker Akademik Pashin and the rescue tug Nikolay Chiker, they were met on the Malecón, Havana’s long esplanade along the coastline, by high-level Cuban officials and a large gathering of common Cubans who came to salute the Russian navy” (CSIS, juin 2024).
La Chine et la Russie sont partenaires du Venezuela en matière de défense. C’est par ailleurs le cas que de l’Iran, de Cuba et de la Turquie. La Chine et la Russie sont par ailleurs fournisseurs d’armements au Venezuela et sont un soutien économique. Cette projection des deux acteurs dans cette zone répond au besoin de soutenir les régimes en contradictions avec les Etats-Unis.
Vladimir Poutine salue la ré-élection de Nicolas Maduro et souhaite réaffirmer leur engagement bilatérale. Ce soutien est une réponse favorable à la République Bolivarienne du Venezuela, soutenant elle-même l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
La Chine a félicité Nicolas Maduro par le porte-parole des affaires étrangère, Lin Jian.
En 2015, la Chine s’est orientée vers le Venezuela avec un investissement de 10 milliards $.
En 2023, Xi Jinping et Nicolas Maduro ont signé un accord de coopération bilatérale portant sur l’économie, les technologies, le spatiale, etc. La Chine est le plus grand importateur de pétrole vénézuélien. L’intérêt pour les BRICS seraient de tirer profit des réserves du Venezuela, l’Argentine s’étant désistée.
La Turquie a communiqué ses positions suite aux élections sur le site de l’ambassade à Caracas (29 juillet).
Point sur le Brésil
Depuis la destitution de Dilma Roussef, et le gel des relations diplomatiques entre les deux voisins, les relations entre le Venezuela et le Brésil furent, durant le mandat de J. Bolsonaro, inexistante. Elle sont aujourd’hui, malgré les sourires de façades et un certain soutien entre les deux présidents, pour le moins tendues. Le président Lula s’est exprimé en faveur d’élections libres, du respect des processus démocratique, particulièrement “effrayé” suite aux avertissements de Maduro le 17 juillet, concernant un éventuel “bain de sang” en cas de défaite.
La crise économique a conduit en 2018 un afflux de migrants à traverser la frontière brésilienne. Les causes de tensions entre le Venezuela et le Brésil au nord sont nombreuses et ont accéléré l’agenda de déploiement de forces brésiliennes dans l’Etat de Roraima en décembre 2023 et janvier 2024, bien que le président brésilien n’a pas officiellement condamné les ambitions territoriales de Caracas sur l’Essequibo (voir mon article: Roraima, enjeux brésiliens d’une triple frontière).
instabilités dues à la forte croissance des investissements étrangers au Guyana
contentieux de l’Essequibo (référendum)
installation de la Fuerza Armada Nacional Bolivariana (FANB) sur l’île d’Anakoko
criminalités et feux de forêts
Au 29 Juillet, le Brésil réclame une vérification impartiale. Une note de l’Itamaraty annonce que :
“ Le gouvernement brésilien se félicite du caractère pacifique de l'élection d'hier au Venezuela et suit de près le processus de comptage des votes. Le gouvernement brésilien réaffirme également le principe fondamental de la souveraineté populaire, à respecter par la vérification impartiale des résultats. Dans ce contexte, le gouvernement brésilien attend la publication par le Conseil National Électoral des données ventilées par centres de vote, une étape essentielle pour la transparence, la crédibilité et la légitimité du résultat du processus électoral”.
Supposition : le Venezuela peut être un voisin embarrassant pour le Brésil en ce sens que ce dernier, afin d’être bien assis sur sa position de leader régional, nécessite que son voisinage direct soit dans une dynamique de non-turbulence et de non-provocation, surtout aux frontières. Trop d’acteurs occidentaux et asiatiques déploient leur influence dans la zone : des perturbations, crises et violences durables au Venezuela ont des répercussions régionales. Effectivement, les Caraïbes et les Antilles sont le Rimland des Amériques.
Ceci coïncide avec un contexte mettant symboliquement le Brésil en avant dans la communauté internationale et auprès des autres puissances économiques. Actuellement, le Brésil est à la présidence du G20. Les 25 et 26 juillet, les membres sont arrivé à un consensus : “Selon le ministre des finances (ndlr: Haddad), les documents signés par les ministres des Finances et les présidents des banques centrales du G20 mettent en avant les priorités brésiliennes. Ils mentionnent spécifiquement l'inclusion de la taxation des super-riches à l'agenda international, l'augmentation du financement pour les transitions écologiques, le renforcement des banques multilatérales de développement (BMD), le soutien aux nations endettées, et la promotion des réformes de la gouvernance mondiale” (g20.org).
Intérêts pour les personnes qui voudront en savoir plus sur les groupes armés, je propose une première vue sur :
Pour en savoir plus sur les enjeux brésiliens à la frontière avec le Venezuela et le Guyana, voir l’article ci-dessous :
Merci d’avance pour vos partages auprès de vos réseaux et communautés.
La Revista (30 juillet 2024)